Avec la crise, la liste des dépôts de bilan s'allonge. C'est dans ce vivier bien rempli, qu'une petite poignée d'investisseurs viennent pêcher. A leurs risques et périls.
Walter Butler désigne une pile de feuilles couvertes de tableaux."Une liste d’entreprises en dépôt de bilan. J’en reçois une par semaine. La grande majorité partira en liquidation." Sous ses dehors policés, cet énarque exerce depuis vingt ans un métier de cow-boy: le retournement.
Le rachat d’entreprises en crise, pour y investir et les restructurer, puis les revendre avec une plus-value. Ses concurrents s’appellent Hélène Martel-Massignac (Caravelle), Didier Calmels (D&P), Jean-Louis Grevet (Perceva), Jean-Louis Detry (Vermeer Capital), Nicolas de Germay (Alandia)… Un cercle très restreint.
"Nous pouvons travailler avec au maximum dix fonds de qualité", juge Nicolas Dufourcq, le directeur général de Bpifrance. Pas étonnant qu’ils ne soient qu’une poignée: ces investisseurs exercent un métier à haut risque, et prennent parfois des raclées sévères. Caravelle, un des acteurs solides de la place, a jeté l’éponge pour le transporteur Mory Ducros. Un an plus tôt, Walter Butler a dû liquider Virgin. Ces échecs plombent la rentabilité des fonds. Et les contraignent à dégager des profits énormes sur d’autres dossiers, pour compenser.
Pénurie de "bons dossiers"
Retourneur, un "métier de chien". Une fois l’entreprise rachetée, démarrent de laborieux chantiers: plan social, investissements, refonte du management… "Les grèves, les séquestrations, les comités d’entreprise, il faut tout affronter?!" lance Cédric Colaert, fondateur de Eight Advisory, expert dans l’audit des "situations spéciales". "Nous passons 90% de notre temps à faire un travail très opérationnel", dit Jean-Louis Grevet, repreneur de Monceau Fleurs et Dalloyau, qui guigne le traiteur Hédiard.
La crise ne fait pas forcément leur miel. Au troisième trimestre, 12.790 entreprises ont déposé le bilan – un record depuis 2009. Malgré cela, les repreneurs déplorent la pénurie de "bons dossiers". Dans les situations vraiment dégradées, les candidats ne se bousculent pas : Alandia était seul en lice pour le fabricant de nourriture animale Continental Nutrition – décision attendue ce 5 décembre –, qui emploie 700 salariés et perd 1 million d’euros par mois.
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